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François DILASSER (1926-2012)

François DILASSER (1926 – 2012)

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C'est en 1926, à Lesneven en Bretagne, que naît François Dilasser. Comme le père de Jean Dubuffet, le père de François travaille aussi dans le milieu du négoce de vin.

Jusqu'à l'âge de quarante ans, il exercera différentes professions... Mais il n'oublie pas que dès son plus jeune âge le dessin, l'attrait des couleurs sont pour lui comme une seconde nature. Il aimait recopier des illustrations qu'elles soient de l'Écriture Sainte ou des images de tableaux de peintres célèbres. Quelques cours auprès d'un peintre local, mais sans suite...

Il faut bien faire vivre la petite famille. Mais pour lui, peindre ou dessiner n'est pas un loisir, mais une quête personnelle profonde qui l'occupait tous ses temps libres. François Dilasser est un autodidacte, et c'est dans ces heures arrachées au travail professionnel qu'il progresse et cherche son chemin... La peinture est en quelque sorte un refuge et l'aide à surmonter de douloureuses épreuves comme le décès de sa première épouse.

En 1943, il découvre une reproduction du Cheval blanc de Gauguin. Coup de foudre pour les couleurs, la mise en page... Un vraie révélation...

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                                                      Le cheval Blanc - Gauguin

En 1958, nouvelle révélation avec la peinture de Bissière (1886-1964). Une sincère et discrète amitié s'établira au fil des années. Il abandonne les pinceaux quelque temps pour un travail de toiles qu'il découpe directement dans la couleur, puis les assemble. Souvenir de Matisse. Il voue une réelle admiration pour l'École de Paris, Manessier, Le Moal, Tal Coat... Il se cherche et le retour aux pinceaux ne tarde pas.

 Bissière - NocturneCapture01.jpg

En 1966, il sent qu'un changement radical de vie doit s'effectuer. Ses heures à l'atelier se feront de plus en plus nombreuses. La peinture s'impose à lui et il n'y aura, dès lors, plus de retour en arrière sinon ce seul sentiment :

« J’ai parfois le sentiment qu’en peignant je cherche à retrouver ma propre naissance, à retrouver l’origine ».1

 

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                               Les pélerins - 1990

 

 

François Dilasser travaille par cycles, par séries. Cent fois, il remet en chantier ce qu'il a peint la veille. Les photos des murs de l'atelier en sont le témoignage. Il y aura ainsi les jardins, les veilleurs (1991), les mains (au cours de l'été 1997), les têtes (1998 reprises des années 1971), les arbres (1999, série déjà apparue en 1993), les comètes...

De nombreuses expositions jalonnent ces années. Elles ont surtout eu lieu à Paris et en Bretagne.

« Je me peins moi-même, c’est ce qui me fait vivre »

 

Comme on peut le voir, il est des peintres dont la biographie ne se laisse tracer que par quelques dates qui jalonnent une vie modeste mais, ô combien, attachante. Celle de François Dilasser appartient à celles-ci.

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Sans Titre - Déc. 1986

 

Les éditions Le Temps qu'il fait ont publié quelques livres illustrés par François Dilasser, dialogue texte/images avec des amis, comme Jean Pierre Abraham (Lettre à François Dilasser) ou Paul Louis Rossi (Inscapes). D'autres, plus intimes, avec Antoinette Dilasser : D. et Journal hors temps. Entre autres...

François Dilasser s'est éteint en 2012, après une longue maladie. La Passe, journal écrit par Antoinette Dilasser évoque admirablement les dernières mois vécus auprès de son mari.

 

Ouvrages sur François Dilasser :

DILASSER. René le Bihan Éditions Palantines. 210 pages.

 

DILASSER. Jean-Marc Huitorel. L' État des Lieux / Galerie Clivages. 86 pages

 

 (N'oubliez pas d'aller consulter l'album photos de ses peintures situé en haut à droite de cette page.)

 

"Oui, j'aurais aimé rencontrer François Dilasser dans son atelier..."

C'est par le plus grand des hasards que j'ai découvert la peinture de F. Dilasser en 1993, je commençais tout juste à être familier des miniatures de Julius Bissier*. Les conditions de ces deux rencontres furent légèrement différentes, mais c'est par l'intermédiaire de la presse qu'elles s'effectuèrent dans les deux cas. 

    Les Chroniques d'art sacré de cet été là avait fait la couverture de leur revue avec une reproduction d'un de ses tableaux . Il s'agissait de "Jardins", une série de 1990.

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Puis, dans les pages qui suivaient, un petit dossier présentait l'artiste et son travail. Les dessins étaient en noir et blanc parce que la revue n'était pas assez riche pour avoir des reproductions couleurs. Qu'importe, c'était une invitation à en savoir plus. Je me retrouvais pleinement dans ce travail. On sentait une matière, des transparences que le noir et blanc ne dissimulaient pas, bien au contraire. Ces tableaux avaient une vie propre. Ce que Dilasser disait bien : "Je ne me sens pas abstrait. Mon critère il faut que cela soit vivant." Et puis il y avait cette notion de série qui me plaisait beaucoup. Internet n'existait pas, il m'était donc impossible d'avoir d'autres reproductions, d'en savoir plus....

     Quelques semaines plus tard, j'ai donc pris ma plume, et j'ai écrit à la revue qui transmettra mon courrier à l'artiste. François Dilasser me répondit très rapidement. Un échange épistolaire s'est établi durant quelques années. Je me sentais à la fois "petit" et "respectueux". J'entends par là le fait qu'il avait l'âge de mon père et avant qu'un lien d'amitié sincère ne puisse s'installer il faut peut être plus de temps qu'entre deux personnes d'un âge plus rapproché. Je ne puis m'empêcher de penser que j'aimais bien lorsqu'il terminait ses lettres "avec toute mon amitié". Je lui faisais part de l'avancée de certains de mes travaux. Lui, par contre, m'encourageait mais ne se livrait pas beaucoup. Peut-être par manque de temps, et puis, je ne devais pas être le seul à lui écrire... Sa plus belle écriture n'était-elle pas celle de ces tableaux et de son travail au quotidien !

    Les deux seules occasions de nous rencontrer ont été rendues possible lors de ses expositions à Paris en 1995 , puis en 1997, à la Galerie Montenay rue Charlot à Paris. Cette dernière exposition présentait la série des "planètes".

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Quels souvenirs ! Nous avions échangé quelques mots, -mettre un nom sur un visage- mais le vernissage d'une expo n'est jamais le lieu d'une véritable discussion.

   Au cours de ces quinze dernières années, par mon métier de libraire, j'étais plus ou moins en relation avec la maison d'édition, "Le temps qui passe", où François Dilasser et son épouse faisaient éditer leurs ouvrages. J'achetais tout ce qu'ils publiaient. Certains livres, les plus petits, m'étant envoyés directement par lui-même accompagnés de quelques mots de dédicace toujours délicats.

   Je m'étais fait la promesse d'aller à Lesneven pour une rencontre plus dense. Mais elle n'eût jamais lieu. La Bretagne, celle du Nord, des rochers et des tempêtes, reste une terre inconnue pour moi encore aujourd'hui...

   Enfin, lorsqu'Internet a fait son apparition, j'essayais de savoir si une nouvelle exposition était prévue dans un avenir proche à Paris. Il devait passer me voir au vernissage de mon exposition sur les "Variations Dominique" en 1996. Mais il n'a pas pu venir, s'en excusant par une petite carte très sympathique. Un certain nombre d'expositions ont eu lieu, principalement en Bretagne, surtout la grande rétrospective de 2008 à Brest. Mais là encore...

    Lorsque je reçus "La Passe" au début de 2012, j'ai tout de suite compris pourquoi au cours de ces dernières années notre échange épistolaire s'était raréfié, puis arrêté... La maladie avait pris le pas sur la peinture. Dans ce livre magnifique, écrit par sa femme comme un journal à deux voix, s'exprime la progression et l'envahissement de la maladie qui prend peu à peu le dessus sur toutes les facultés, laissant l'autre devant un constat : il n'y a plus que l'amour seul au centre de toute communication. Ce qu'Antoinette Dilasser décrit admirablement.

Dans l'oeuvre de François Dilasser, j'aime tout... (un peu moins les toiles de la série "Les mains" de 1997, je l'avoue.) Alors faute de voyages en Bretagne, faute d'expositions ratées ou inconnues, faute d'une rencontre qui n'aura plus jamais lieu, il me reste le livre de René Le Bihan**, qui est le meilleur des catalogues. Quel plaisir de le prendre et le reprendre, lire un texte ou tourner les pages. Une belle invitation au voyage dans cette oeuvre pour moi si riche et extraordinaire.

 

 

 

 

 

 

* Julius Bissier a fait l'occasion d'un article sur ce blog, au mois de septembre.

**Je crois malheureusement que ce livre n'est plus disponible actuellement, sinon d'occasion.

 

    

 

 

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